vendredi 15 octobre 2010

Soulever une pierre, se tâcher de poussière

Sur un chemin que j'emprunte souvent, j'avais déposé une pierre. Je pensais l'oublier. Juste, je l'avais poser.

Et puis je l'ai oublié. Elle faisait partie du chemin. Je ne la regardais plus. C'était ainsi.

Avec le temps, elle n'était plus à la même place. Les souffles du vent, de la pluie mais aussi les passages nombreux des rencontres l'avait déportée dans l'herbe, hors du chemin.

Un matin, j'ai remarqué son absence. Ça faisait longtemps qu'elle n'était plus là mais je ne sais pas pour quelle raison, ce matin, ça avait de l'importance. Je l'ai cherché pendant des jours. Et finalement, un jour, je l'ai retrouvé. Je n'ai pas voulu la toucher tout de suite. J'ai voulu réfléchir à ce que je faisais.
Ce n'était qu'une pierre après tout. Mais je me demandais pourquoi je l'avais laissé là, pourquoi je l'avais laissé à ma vue, comme pour la surveiller. Je me demandais pourquoi j'avais tout de même essayé de l'oublier et pourquoi je l'avais oublié.

Après plusieurs jours de réflexion, je me suis dit que je n'avais rien à craindre de cette pierre. Mais c'est en la soulevant que je me suis tâché avec la terre, la boue et la poussière qu'elle avait abritées depuis tout ce temps.


Ce que j'essayais d'oublier c'est qu'elle était abîmée en dessous. Je l'avais posé il y a fort longtemps de manière à ne voir que les jolies perspectives de ses formes et de ses couleurs. J'avais oublié qu'en-dessous, elle était tâchée elle aussi, qu'elle était brisée. J'avais oublié qu'elle m'avait blessé et qu'elle portait encore mon sang. J'avais oublié que même lorsqu'on laisse quelque chose de sale sur le côté, ce n'est pas comme ça qu'on peut espérer qu'elle se lave de tout.


L'eau coule sous les ponts mais la vase s'accumule, les herbes poussent et effacent ce qui existaient avant.

vendredi 8 octobre 2010

Chercher les emmerdes

Ca devait arriver. Je m'ennuie.

Dans tous les contes, quand quelqu'un a l'habitude de vivre de passionnantes aventures à chaque branche de forêt, il se trouve logique qu'après quelques temps de répit, il s'ennuie. Il a besoin d'action.
Dans mon cas, c'est pareil.

J'ai beau fouillé dans mon coffre, je n'ai rien trouvé à finir, rien à commencer, rien. J'avais bien un truc sur le feu. Une vague histoire de jus d'orange qui pique, de mystère et de stratégie mais je sais aussi que quand j'aurai rouvert cette boîte, celle-ci va vite me lasser et j'aurai de nouveau envie de la refermer pour la plaquer sous mon lit.
Et puis, on ne peut pas jouer éternellement avec les mêmes jouets, il faut savoir en changer. En trouver de nouveau. Mais j'avoue, je n'ai pas envie de faire la démarche. Je m'ennuie mais je n'ai pas envie de me compliquer la vie.

Pour me dissuader, je réfléchis aux conséquences. Alors je pense à ce nom étrange, à ces dents qui menacent de me mordre quand je ferme les yeux, à certaines nuits, aux sacs de sable,...
Et c'est en énumérant tout ça, en ressassant ça dans ma tête que j'ai tout doucement perdu de vue l'objectif premier de cette liste : me convaincre d'abandonner.
Il le fallait pourtant. De l'eau était passée sous les ponts, tout le monde avait oublié les vieilles rancunes, oubliant parfois jusqu'à l'existence de l'autre. On avait tourné la page. Alors pourquoi une réapparition soudaine donnerait lieu à des retrouvailles en grandes pompes, à de joyeux souvenirs et surtout, effacerait tous les effets secondaires d'une alchimie aussi destructrice et surtout inutile ?

J'en sais rien.

Je vais attendre le prochain cadavre devant ma porte et voir s'il m'inspire plus que les vieux os qu'il y a sous mon lit.