samedi 20 décembre 2008

Les dindes de Noël

Le claquement des talons. La couleur du rouge à lèvres. Le surplus de mascara. Les cheveux brillants. La couleur de la veste, de la jupe ou du string qui dépasse. Le vernis sur les ongles soignés. La coiffure minutieusement préparée. La façon de marcher, de se baisser, d'afficher un sourire.

C'est la même chose pour les mâles même si les rituels de mise en valeur diffèrent. Ils veulent tous sortir de la masse, se faire remarquer, être différent. Ils souhaitent tous se faire remarquer, qu'on les envie ou qu'on les aime au premier coup d'oeil. Ils se pavanent comme dans les défilés ou dans les émissions à la télé parce que "si ça marchent pas eux, pourquoi pas pour moi ?".

C'était la femme de ménage d'un hôtel qui disait que les personnes qui avaient l'air les plus soignées étaient souvent les plus dégueulasses dans l'intimité. Au sens propre comme au figuré.

Dégueulasse, je ne sais pas. Vides et sans intérêt, y'a des chances. Pourquoi dépenser autant d'énergie et de fric dans des trucs aussi futiles qu'une veste à 800 euros parce qu'elle est "classe" si ce n'est pour camoufler le manque de conversation, d'intérêt ou même d'intelligence ?

Cette fille qui danse au centre de la pièce, entourée de garçons qui la veulent dans leur lit et de filles qui aimeraient être à sa place, c'était l'attraction de la soirée. Et une fois le spectacle terminé, la voilà seule avec sa perruque, ses frou-frou et son rembourrage à se demander pourquoi derrière ce sourire factice, il n'y a pas un réel bonheur qui dure plus longtemps que les attouchements d'un de ses prétendants.

Il est seul aussi l'homme qui sait jouer de ses phéromones avec les demoiselles. Elles sont toutes autour de lui à vouloir le toucher, le caresser, le tripoter, faire mieux que la précédente. Les hommes aussi tournent autour de lui. Peut-être que les non-nominées auront besoin d'être consolées... En attendant, le lit du Don Juan les a toutes connu. Les plus belles en tous cas. Mais le jour venu où il est seul avec sa tristesse, il n'y a personne pour tendre un mouchoir à l'étalon qui se demande "à quoi bon...".

C'est en les regardant que je me rendais compte que nous étions toujours passés inaperçus. Nous étions communs, sans originalité aucune dans l'emballage, que nous étions des fantômes parmi une population faites de strass et de paillettes et qu'au final, c'est notre anonymat qui nous sauvera. Entrer et sortir à visage découvert. Les ringards vaincront car personne ne les remarque. Nous avons toujours été libres de faire ce que nous voulions et personne n'y a jamais trouvé à redire parce que nous étions toujours alliés avec Mademoiselle Discrétion.

Faire profil bas, ne jamais trop en faire, rester dans l'ombre. C'est Hadrien qui disait souvent ça à la Petite mais je n'avais jamais réalisé à quel point c'était vrai et efficace.

Ce doit être les fêtes de Noël qui me font cet effet-là... Marcher au milieu des paumés qui regrettent d'avoir une famille, pure perte de temps dans la recherche de l'autosatisfaction, au moment des fêtes. Regarder comment ils essaient d'accrocher l'oeil sur eux, d'attirer les regards, l'attention alors que tout ce que je cherche, c'est un moyen de départager qui remportera le ticket gagnant. Peut-être la pouffiasse décolorée qui me reluquait au loin et qui n'a pas pu s'empêcher de me bousculer en prétendant de ne pas l'avoir fait exprès, avec un sourire de catin et une expression de chaudasse dans la voix.

Je crois que ce Noël-ci, je vais faire comme les autres. Participer au sacrifice rituel d'une dinde et la partager avec la famille avec quelques sapins comme décor. Après tout, s'il le faut vraiment, adoptons les coutûmes sociales.

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